Le terrorisme est un phénomène mondial complexe, aux dimensions interdépendantes, psychologiques, spirituelles, culturelles, sociales, économiques et politiques, soumis à beaucoup d’interprétations (superficielles), ou à une seule dimension. Ce phénomène fut utilisé dans des tribunes médiatiques mondiales pour condamner des États musulmans en particulier, ou pour criminaliser la religion musulmane et l’accuser d’être la source du terrorisme! Alors que le concept de « terrorisme » est apparu avec son sens politique, dans ce qu’on a appelé l’ère de la Terreur après la Révolution française qui s’est déclenché en 1789. Il s’agit de la période secouée par la violence et de tuerie, au cours du conflit acharné entre les groupes politiques rivaux des Girondins et des Jacobins. Parmi les plus célèbres dirigeants de cette campagne de terreur, on cite l’avocat et le leader politique français Maximilien Robespierre qui dit dans son ouvrage Sur les Principes de Morale Politique, paru en 1794: «La vertu, sans laquelle la terreur est funeste; la terreur, sans laquelle la vertu est impuissante. La terreur n’est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible; elle est donc une émanation de la vertu...».

 

Des périodes historiques se sont écoulées, au cours desquelles le monde a connu des attaques terroristes abominables à l’instar de ce qu’a fait l’anarchisme (ou l’action chaotique), un mouvement mondial, attaché à une façon pompeuse de comprendre la justice, orientée vers la suppression de l’autorité de l’État. Né en 1870, le premier groupe qui s’en inspira fut le groupe russe Narodnaïa Volia (Volonté du Peuple) qui opta pour la violence pour obliger l’État tsariste à reconnaître les droits constitutionnels. Et c’était la seule politique qui adoptait le terrorisme politique, tel le recours à un attentat suicide pour assassiner le tsar russe Alexandre II, et beaucoup de ministres russes. Le mouvement s’est répandu rapidement en Europe puis dans les deux Amérique, et entre 1894 et 1900, les criminels anarchistes ont assassiné le Président français, l’Impératrice d’Autriche et le Roi d’Italie. Par ailleurs, en septembre 1901, l’anarchiste Leon Czolgosz  assassina le Président des États-Unis  William McKinley. La communauté internationale considéra que l’anarchisme représentait un grand danger qui menaçait la stabilité politique, économique et sociale dans le monde. A partir de cela, l’historien David Rapoport affirma que l’anarchisme représentait la première vague moderne du terrorisme.

 

L’extrémisme religieux

Décrire la violence en tant que produit religieux a fait l’objet de nombreuses discussions qui ont conduit à une sorte d’amalgame entre la religion et la violence. L’écrivain britannique Karen Armstrong affirme à cet égard ceci: «on entend constamment l’affirmation récurrente : la religion est violente et agressive ». Et on exprime cette idée comme suit: «La religion a été à l’origine de toutes les grandes guerres dans l’Histoire». Et cette formule est citée sur un mode incantatoire ! Elle est reprise à la radio et la télévision américaine, par les psychologues, même les conducteurs de taxi à Londres, la répètent bien avant les académiciens d’Oxford. Cette expression répandue est bien surprenante, car tout le monde sait que les deux Guerres mondiales n’avaient pas éclaté pour des motifs religieux!

 

Les historiens de guerre, qui discutent des causes des guerres, affirment en outre que de nombreux facteurs sociaux liés, des facteurs idéologiques et matériels, poussent, tous ensemble, les hommes à faire la guerre. Et les experts en violence politique et terrorisme insistent sur le fait que les humains commettent des actes sauvages pour des raisons multiples et complexes.

 

Une lecture minutieuse de l’Histoire de l’Humanité nous révèle que la violence est inhérente aux interactions entre les civilisations; aussi, dans une étude intitulée Exposé  quantitatif de la violence politique à travers les civilisations mondiales, publiée par le Centre Royal de recherches et d’études islamiques jordanien en 2009, le docteur Naveed Shaikh traite des victimes de la violence religieuse et politique dans les deux derniers millénaires et l’impute à la civilisation culturelle. Il a dressé une liste de plus de 3000 confrontations violentes dans l’Histoire, depuis la naissance du Messie, (‘alayhi Assalam), jusqu’en 2008. Puis, il signale 276 conflits des plus violents dans l’Histoire, dont chacun a fait un nombre de morts évalué à 10000 hommes ou plus. Il a ensuite donné une classification de ces conflits en fonction du nombre de morts, en commençant par le plus important. Puis, il a classé les résultats, selon des critères civilisationnels.

 

Quelques exemples de ces événements:



Les débats qui font rage entre les défenseurs et les détracteurs de la religion ne ciblent pas le fond du problème; car la structure de l’extrémisme est toujours la même avec toutefois les différences claires entre les extrémistes chrétiens, juifs, musulmans, nationalistes, communistes et nazis, …etc. L’extrémisme qui a animé tous ceux-là est de même nature, et ne présente aucune différence, qu’il ait un arrière-fond religieux, racial, national ou social. Il y a un degré de similarité et de ressemblance entre les mouvements extrémistes en général qui se manifeste dans leur degré de gravité, la profonde adhésion et la loyauté de leurs partisans, dans la force qui les poussent à l’expansion et la tentative d’hégémonie qui les caractérise nourrissant chez leurs partisans une disposition à mourir et un penchant pour l’action collective organisée. Tous ces mouvements, nonobstant l’idéologie à laquelle ils adhèrent ou les croyances qu’ils prônent, ou l’agenda qu’ils souhaitent mettre en avant, sèment chez leurs partisans le zèle extrême, la haine abominable et l’intolérance. Et ils sont tous capables de tirer pleinement profit des capacités d’action présentes chez leurs adeptes dans certains domaines de la vie, et tous ces mouvements enfin endoctrinent leurs adeptes en leur imposent la foi aveugle et le dévouement absolu.

 

Par ailleurs, dans l’introduction de son livre La conversation avec l’ennemi - La religion, la fraternité, la “fabrication” des terroristes et leur démantèlement, le chercheur sur les mouvements extrémistes, Scott Atran, souligne ceci:  «Les terroristes commettent des actes terroristes, non pas qu’ils se vengent exceptionnellement, ou qu’ils soient indifférents ou pauvres, incultes et serviles, ou qu’ils manquent d’estime de soi ; et ce n’est pas non plus qu’ils aient reçu au cours de leur enfance un enseignement religieux extrémiste, qu’ils se soient exposés à un lavage de cerveau, qu’ils aient un penchant pour le crime, ou même qu’ils soient suicidaires … .Les terroristes ne sont pas la plupart du temps anarchistes, mais ils sont extrémistes moralement, fortement attachés à un espoir insensé. Olivier Roy a remarqué une espèce de similarité dans le fond psychologique entre les opérations d’Al-Qaïda et Daech, et les opérations suicidaires qu’exécutent les partisans des mouvements anarchistes, du point de vue de la «mise en scène», la tentative de «se distinguer» radicalement et la volonté de rompre définitivement avec la société, le retournement surprenant contre l’environnement proche, le fait de traiter avec ceux qui les entourent, comme s’ils étaient des athées, des apostats ou des coupables, alors qu’ils considèrent la nouvelle communauté comme une famille ou une tribu.

 

(Il n’y a pas d’innocents, c’était l’expression de l’anarchiste Émile Henri en 1894, quand il jeta une bombe sur le café Terminus à Paris). D’autres ont remarqué une grande ressemblance entre les Daechiens et les nazis au niveau psychologique, a prpos de l’influence exercée sur eux par les discours de lutte et de sacrifice de soi, en plus de l’impact de l’image qu’on a de soi dans le processus de formation, de regroupement et de construction chez eux, se considérant en tant que communauté surhumaine.

 

A partir de cela, les travaux de recherche et de «prospection» du phénomène du terrorisme doivent passer beaucoup d’idées et de préjugés dominants et être enseignés entant que phénomène social complexe et interdépendant.