La relation dialectique entre la pensée et les médias est une épée à double tranchant qui a grandement affecté les sociétés islamiques au cours des dernières années et décennies, aboutissant à des crises mondiales lorsque les extrémistes d’Occident et d’Orient ont usé de médias malveillants pour en faire des plateformes de terrorisme, provoquant des guerres destructrices et l’occupation criminelle de pays tiers.

 

La théorie du choc des civilisations de Samuel Huntington émise lors de la dernière décennie du siècle dernier n’était pas sans rapport avec tout cela, et la rhétorique hostile qu’elle prônait contre les musulmans en Europe et en Occident en général a été suivie d’appels à l’islamophobie et à la haine et d’attaques contre les symboles islamiques haïs par les partis extrémistes de droite, que ce soit dans l’Ouest européen ou américain. Cela a été contré par une action volontaire ou présumée involontaire dans les pays arabes et les musulmans, et exploité par des mouvements extrémistes revendiquant leur affiliation à l’islam, tels qu'Al-Qaïda, Daech et Boko Haram, entre autres, qui ont contribué par le biais de leurs idéologies et leurs médias à causer des bouleversements mondiaux et religieux, sachant que ces groupes ne représentent ni leurs États ni leur nation et ne représentent qu’eux-mêmes.

 

Il ne fait aucun doute que les médias jouent un rôle important et significatif dans la formation des convictions et des points de vue dans la vie contemporaine, et leur impact ne se limite plus aux médias officiels des pays, ni aux centres de décision médiatique politique internationale, régionale ou locale, mais chaque parti, groupement ou organisation, aussi petit soit-il, dispose désormais de sa plate-forme médiatique et d’un site Web à travers lesquels il s’adresse à ses partisans, à ses ennemis et au monde entier. En fait, tous les gens, quelle que soit leur identité intellectuelle, nationale, ethnique, religieuse ou politique, disposent désormais de sites Web s’adressant à tous, qu'ils soient ciblés ou non par le discours. Or, cette situation médiatique contemporaine comporte de grandes promesses et des avertissements, car ces sites peuvent servir les gens ou être utilisés pour leur nuire et leur apporter le mal et la destruction. Aussi, les arènes médiatiques devraient-elles être considérées de nos jours en tant que champs de confrontation médiatique et intellectuelle. Certains mènent davantage leurs batailles intellectuelles, religieuses, culturelles ou politiques sur des sites de communication électronique plus que sur le terrain. Le danger est que ces guerres virtuelles peuvent provoquer des effusions de sang, et engendrer du terrorisme plus que sur un vrai champ de bataille, ce qui impose de s’attaquer à ces risques intellectuels et médiatiques et empêcher ces gens de poursuivre leurs guerres aveugles et absurdes.

 

La responsabilité des médias devient plus importante lorsque la confrontation se fait avec les groupes et organisations terroristes qui embrassent les actes terroristes et les légitiment d'un point de vue sectaire - non religieux - à travers leur message et leurs médias. La confrontation avec eux ne dépend pas uniquement du domaine militaire et sécuritaire, mais nécessite plutôt la mise en place d'agences médiatiques compétentes, la formation d'experts techniques des médias et l'élaboration de plans scientifiques pour mener également des batailles médiatiques. Les organisations terroristes possèdent aujourd'hui sur Internet des médias électroniques et des sites Web qu'ils utilisent pour accroître leurs partisans, adeptes et sympathisants au cours des dernières années. Or, cela contraint les organes de la CIMCT qui luttent contre les groupes et les organisations terroristes à connaître en premier lieu les raisons du succès médiatique des adeptes du terrorisme, de la sédition et de la discrimination, et en second lieu les raisons qui poussent ces partisans et ces adeptes parmi les citoyens des pays affectés à les suivre, pour pouvoir ensuite établir les plans susceptibles de contrecarrer ces campagnes médiatiques terroristes, et réfuter leurs thèses terroristes et offrir d’autres alternatives convaincantes, car prétendre simplement réfuter les idées terroristes sans fournir de substitut convaincant ne constitue point de remède efficient.


L’une des plus grandes erreurs commises par les médias occidentaux est de taxer l'islam de terrorisme, sans autre raison que d'essayer d’effaroucher les gens de l’islam car c’est la religion la plus en expansion en Occident. Ces médias occidentaux sont soit déficients, soit malveillants, et ils ne doivent en aucun cas être qualifiés de démocratiques. Le terrorisme n’a pas d’identité religieuse et les adeptes sincères des religions ne le commettent pas, car la vraie religion est celle qui appelle à la paix, à la sécurité et à l’islam, et quiconque insiste à stigmatiser l’islam et à le qualifier de terroriste est un partisan direct ou indirect du terrorisme, ou bien un bénéficiaire du commerce du terrorisme, ou serait en relation douteuse avec des organes de renseignement pernicieux.

 

Depuis leur émergence, les médias sociaux électroniques sur Internet se sont transformés en champs de batailles intellectuelles, médiatiques, politiques, ethniques et autres, et de choc des civilisations, sectes, religions et confessions, devenant de la sorte plus dangereux que les chaînes satellitaires politiques, idéologiques et sectaires, car ils atteignent chaque foyer et chaque jeune et adolescent. Les plateformes de médias sociaux ont en effet des capacités plus performantes pour transmettre leurs messages aux lecteurs, aux étudiants ou au grand public, et investissent leurs portables avant d’entrer dans leur maison, école, université et autres lieux, et elles peuvent les pousser à manifester dans les rues en quelques minutes, ce qui n’est pas possible de l’empêcher sauf avec des capacités techniques élevées et en obtenant des approbations judiciaires formelles.

 

Ainsi, les problèmes et les crises politiques, sociaux, civilisationnels, intellectuels et religieux de la région ont fait irruption sur les sites Web et les médias sociaux, et tout le monde s'est mis à y injecter ses idées positives et négatives, de sorte que les sites Web et les médias sociaux sont devenus une crise en soi. Certains y invoquent même les crises du passé qu’ils ont ravivées avec leurs potentiels positifs et négatifs, et les ont transférées au présent, comme c'est le cas en Syrie, au Liban, en Irak et au Yémen. Ces médias attisent de la sorte les conflits historiques et leur rajoutent en plus les conflits politiques actuels. Les sites Web et les réseaux sociaux se sont transformés en champs de bataille qui nourrissent les haines historiques et l'extrémisme idéologique. Ils ont été encouragés de même par les politiciens qui profitent à des fins politiciennes de ces conflits historiques entre les musulmans. Ces sites ont connu un essor remarquable, passant de 12 sites Web en 1997 à 150.000 sites ces dernières années, Ces sites représentent un terrain fertile pour l’extrémisme idéologique et une large plate-forme pour la pratique du terrorisme.

 

Dans le contexte de ces circonstances politiques et sociales dont souffrent les gens, les théories qui tentent d'analyser les manifestations de l'extrémisme et du terrorisme sont inaptes à fournir des solutions convenables. Le principe de base est de comprendre les véritables causes de l’extrémisme. L’islam ne comporte point d’idéologie agressive dans ses préceptes ou à travers ses textes, mais il y a des erreurs idéologiques d'extrémisme commises par certains musulmans, ce qui nécessite un examen minutieux pour voir si cela résulte d'une mentalité agressive chez ces personnes, ou si cet extrémisme est le fruit amer d'une éducation sectaire partisane.

 

42% de la population mondiale, qui compte environ sept milliards de personnes, utilise Internet, dont environ 29% utilisent les médias sociaux, alors que 51% de la population de la Terre utilise des téléphones intelligents et que 23% d'entre eux utilisent les médias sociaux via les téléphones intelligents. Il ne fait aucun doute qu'une grande partie de la population du monde islamique fait partie de ces grandes proportions, ce qui signifie que ces moyens jouent un grand rôle dans la transmission des messages et l’édification des convictions dans le monde islamique. Les États sont incapables de tout contrôler à moins qu'ils soient en mesure de fournir des visions exprimant les convictions de leurs peuples et de la jeunesse, sinon ils perdront leurs jeunesses et leurs communautés à qui veut bien les encadrer, et causer leur péril, comme cela s’est passé avec une partie des communautés arabes et musulmanes au cours des dernières années.

 

La tentative de réformer les pays musulmans qui souffrent d'extrémisme et de terrorisme ne devrait pas se faire à travers la mise en exercice de théories et de réformes étrangères, car ces théories sont incompatibles avec l’idéologie islamique des musulmans, de même que les responsables étrangers en charge de ces réformes ne sont ni honnêtes ni sincères et désireux de réformes, et s’ils l'étaient, ils auraient alors fermé tous les sites Web qui incitent à l’extrémisme et à la violence, conformément à leurs lois, mais en fait, ils les mettent sous surveillance et les responsabilisent quand bon ils le souhaitent, et fournissent au contraire des conseils qui poussent les services de sécurité des pays musulmans à brutaliser la jeunesse au lieu de l'encadrer et la ramener à la raison.

 

Les conditions tumultueuses des musulmans politiquement, socialement, économiquement et médiatiquement nécessitent des initiatives de réforme convaincantes pour les jeunes musulmans avant qu'elles ne le soient, pour les ministres, les fonctionnaires et les responsables sécuritaires, et c'est ce que devraient assumer les penseurs, les érudits et les imams religieux, à condition qu'ils soient indépendants dans leurs avis, leurs idées et leurs visions, en tant que représentants de l'identité de la société et de toutes ses forces intellectuelles, religieuses et politiques, afin qu'ils soient pour les jeunes dignes de foi et habilités scientifiquement et moralement à aborder les problèmes de leur société.

 

Ces penseurs et réformistes sont tenus de tenir des séances de dialogue direct d'abord avec le plus grand nombre de jeunes, et de comprendre leurs revendications et leurs besoins et les raisons qui les poussent à adhérer à ces organisations extrémistes. A travers ces dialogues publics ou secrets, des sites Web peuvent être lancés que les jeunes eux-mêmes peuvent gérer, pour y diffuser leurs contenus intellectuels et leurs convictions politiques et pouvoir répondre à toutes les questions soulevées sur ces sites. L’initiative de la jeunesse devrait avoir pour objectif primordial de permettre aux jeunes de se faire leurs propres convictions, et que cette initiative communique via les médias sociaux avec les initiatives similaires telles celles du centre d’idal (Modération), de Tanasoh (Conseil), de Tasamoh (Tolérance), et avec tant d’autres forums intellectuels qui s’activent dans la diffusion de la pensée de modération.

 

La vision profonde envers ces problèmes montre que la solution ne réside pas à recourir à la violence face à la violence, ou à censurer les moyens de communication, mais surtout à trouver une génération de jeunes conscients des enjeux de leur nation et de leur époque, et des problèmes qui peuvent les affecter via les réseaux sociaux dont les dangers et les abus peuvent être conjurés grâce à la formation culturelle et scientifique.

 

Les pays islamiques devraient appeler les principaux pays occidentaux à changer leur politique envers le monde islamique et envers sa religion, sa culture et sa civilisation, et à éviter d'offenser l'islam dans les déclarations de leurs dirigeants, que ce soit pour des raisons électorales ou autres, parce que l’islam n’est pas une religion d’extrémisme ou de violence. Car de telles accusations envers l’islam poussent les jeunes musulmans à haïr l’Occident et tous ceux qui soutiennent de telles offenses. Il faudrait éviter à tout prix d’user des sites Web et des médias sociaux pour attiser l’hostilité entre les civilisations et transformer ces sites Web occidentaux en plateformes hostiles.

 

Il est indispensable également de mettre au point des matières scientifiques islamique modérées et tolérantes sous la tutelle des institutions scientifiques et des jeunes eux-mêmes, et non à travers des diktats externes. Il importe aussi d'encourager les rencontres culturelles entre les jeunes de la nation islamique de différentes nationalités, langues et écoles idéologiques contemporaines et patrimoniales, et appeler à considérer les écoles de pensée islamiques historiques comme étant des écoles de pensée historiques et qu’il n’appartient pas aux générations contemporaines de juger leurs productions culturelles, car la convergence des identités islamiques traditionnelles et contemporaines ouvre des perspectives de coopération et d’affection entre les écoles islamiques modernes et traditionnelles.