Face à la violence des mouvements d'extrême droite et de leurs organisations dans les pays occidentaux, il est important d'étudier ce qui se cache derrière la création de ces organisations. Derrière le rideau des scènes violentes se profilent des hommes instruits affiliés à la science et à la philosophie, affichant leurs idées extrémistes sous l'égide de la liberté d'opinion et de pensée. Parfois ils occupent des postes scientifiques distingués et sont autorisés à former l'esprit des générations futures dans les universités et les établissements éducatifs.

Leurs pensées et leurs écrits aux relents de racisme reposent sur des arguments pseudo-scientifiques et juridiques, et leurs discours et conversations regorgent de belles paroles drapées de civilité et de bienséance, mais qui forment en réalité la base idéologique justifiant les multiples actes de violence, meurtres et outrages commis par l'extrême droite contre les civils pacifiques d'ethnies et d'identités étrangères, résidant dans les pays européens et aux États-Unis.

Contexte culturel

Au milieu de la vogue des idéologies de droite extrémistes et violentes opposées aux valeurs d'égalité, tolérance, coexistence et intégration, réapparaît le terme de racisme scientifique. Il semble que la polémique à ce sujet refait surface avec l'émergence de principes de groupes et organisations "blancs", justifiant leur idéologie xénophobe, sous le couvert de défendre l'identité blanche, comme ils le prétendent.

Un autre courant présente l'idée d'inégalité naturelle entre les différentes races, comme un fait scientifique confirmé ! La revue (Mankind Quarterly), publiée en Écosse depuis 1960, est célèbre par son soutient au racisme scientifique, se targuant même d'être le «magazine de la suprématie blanche».

Les extrémistes dirigent des groupes de réflexion, des sites Web, des journaux, des maisons d'édition et des forums scientifiques, tels le magazine (American Renaissance), fondé en 1990, et le (Scandza Forum), qui se tient chaque année dans les pays scandinaves pour rassembler les nationalistes blancs du monde entier.

Théoriciens et penseurs

1) Renaud Camus: théoricien du grand remplacement

Écrivain, historien et homme politique français, ses idées et propos contre les immigrés africains et les musulmans sont apparus en France au début du XXIe siècle. En 2011, il a publié son célèbre livre, Le Grand Remplacement, dans lequel il a présenté ses allégations selon lesquelles la France et l'Europe étaient exposées à la menace du colonialisme par les immigrants.

Les idées de Camus comportent trois thèmes. Le premier est que la société française traditionnelle sera remplacée par un peuple venant du Maghreb et d'Afrique Subsaharienne. Le second est qu'à la société française chrétienne aux valeurs laïques, se substituera au fil du temps une société musulmane dominée par des musulmans extrémistes. Le dernier est que les gouvernements français actuels acceptent cette transformation en permettant aux musulmans de se multiplier sur leurs terres.

La théorie du grand remplacement repose sur le fait que la culture française est la culture des seuls chrétiens blancs et que toute immigration extérieure à cette culture est un grand danger qualifié d'«invasion» par Camus pour qui l'identité islamique est totalement incompatible avec la laïcité et l'identité française. Camus estime que le problème réside dans l'augmentation des naissances dans les familles immigrées ou françaises d'origine immigrée: "Nous sommes clairement colonisés par les Africains, et nous assistons à un grand exode d'un continent à l'autre, et la question ne se limite pas seulement à l'Islam, mais à l'immigration africaine avant tout." Il estime que "l'occupation française des pays étrangers est moins dangereuse que la colonisation démographique menée par les immigrés africains et musulmans en France, sous l'écoute et le soutien des gouvernements successifs, car c'est un colonialisme dont les résultats sont irréversibles".

En 2014, la justice française a condamné Renaud Camus pour incitation à la haine et à la violence, en raison de déclarations faites fin 2010 insultant les musulmans, lors d'une réunion publique à Paris, dans lesquelles il a décrit les musulmans de France comme: "le bras armé de l'invasion, et des colonisateurs qui cherchent à rendre la vie des français de souche impossible, et les forcer à fuir et évacuer le pays ou se soumettre à eux».

Bien que Camus ait nié toute responsabilité pour toute violence commise au nom de sa prétendue théorie par les extrémistes de droite violents, nous constatons que l'auteur de l'attaque contre les deux mosquées de Nouvelle-Zélande en 2019 a intitulé sa fameuse déclaration publiée sur Internet avant de procéder à son opération «le grand remplacement».

2) James Mason: théoricien de l'accélérationnisme

Homme politique nazi américain et pionnier de la théorie d'accélérationnisme. Ses idées sont apparues depuis 1980, puis en 1992, il les a rassemblées dans un livre intitulé "Siège: collection d'écrits de James Mason", connu sous le nom de "The Siege", dans lequel Mason a promu l'idée qu'après l'effondrement des États et des sociétés, les suprématistes blancs seront les seuls survivants de cette guerre totale.

La pensée de l'écrivain vise à inciter les Blancs, et en particulier les groupes extrémistes, à la nécessité de provoquer une guerre raciale qui restaure le statut de l'homme blanc et le protège de ses ennemis d'autres races, en particulier les Juifs qui, selon Mason, sont à la base de la corruption maléfique dans toute société. Par conséquent, les Juifs doivent être éliminés, et avant cela, le système politique mondial qui les soutient doit être éliminé ainsi que tout le système politique mondial qui les soutient. Pour cela, on doit recourir à la révolution, au terrorisme et aux guerres sanglantes.

Mason a été arrêté plusieurs fois entre 1994 et 1999 pour diverses raisons. En 2015, est apparue l'organisation armée néonazie Atomwaffen qui appelle à la violence et aux actes terroristes, et qui a officiellement annoncé que Mason est son conseiller et le livre Siege son programme idéologique.

3) William Luther Peirce: Terrorisme nucléaire

Le lien entre les rêves du chaos créatif chez les partisans du terrorisme blanc et le fantasme du terrorisme nucléaire remonte en grande partie au roman (Les journaux de Turner), publié en 1978, par l'écrivain et physicien néonazi américain William Luther Pierce (1933-2002).

Une étude du Centre international de lutte contre le terrorisme a conclu qu'il existe un lien entre ce récit et au moins 200 meurtres et 40 attentats terroristes au cours des quarante dernières années. Le roman traite d'événements fictifs, passant en revue les mémoires du protagoniste, Earl Turner, membre d'une organisation suprémaciste blanche secrète, alors qu'il cherchait à renverser le gouvernement américain et les institutions sociales et médiatiques dominées par les juifs, les afro-américains et autres minorités. Il établit sa propre unité, qui travaille en coordination avec d'autres cellules de «l'organisation», en menant des actes terroristes et de guérilla qui conduisent finalement au renversement du régime.

Le roman est à l'origine de la vague de criminalité des années 1980, lorsqu'un groupe appelé The Order a été créé. L'un de ses membres les plus éminents était le terroriste Timothy McVeigh, qui a fait exploser un camion rempli d'explosifs à l'ammonium - semblable à celui décrit dans le roman - devant un bâtiment fédéral dans l'État de l'Oklahoma le 19 avril 1995, coûtant la vie à environ 168 personnes. Lorsque McVeigh a été arrêté, des pages du roman ont été retrouvées sur le siège avant de sa voiture. De nombreux experts ont considéré aussi la prise du Capitole, suite à la défaite de Donald Trump lors des récentes élections présidentielles, comme une simulation d'une scène du roman.

4) Richard Spencer: fondateur de l'alt-right

Il a été le premier à formuler le concept de (alt-right) en 2010 pour décrire le courant fondé sur l'idée de nationalisme blanc. Le terme était l'objet de polémiques médiatiques et intellectuelles lors des élections américaines remportées par Donald Trump en 2016. Spencer a fait un salut nazi à Trump le 21 novembre 2016, ce qui a conduit à la défection de certains groupes de la droite alternative et à la création de ce qu'on appelle la (Light Right).

Les idées de Spencer se résument dans la question de "l'identité blanche", et la suprématie absolue et sans équivoque de la race blanche dans tous les domaines. Il appelle à s'opposer aux réfugiés, homosexuels et mouvements féministes, à la construction d'une nouvelle société et d'un "Etat ethnique" pour les Blancs et à une campagne de purification ethnique de manière pacifique.

5) Martin Sellner: entre racisme et multiracialisme

C'est le leader du mouvement "Génération d'identité autrichienne", du mouvement "Défendre l'Europe" et leader de facto du mouvement identitaire dans toute l'Europe. En raison de sa maîtrise de la langue anglaise et de sa popularité sur les sites de communication, il propage des idées de supériorité raciale et de racisme envers d'autres minorités en Europe. Il avait des liens avec le terroriste Tarrant qui a mené l'opération de Christchurch en Nouvelle-Zélande. Sellner affirme qu'il n'est pas raciste, mais croit plutôt en l'ethnopluralisme et au droit de chaque civilisation de conserver sa propre identité distincte. Ce principe signifie en pratique la séparation des races.

6) Nick Land: théoricien des Lumières sombres

(The Dark Enlightenment) est une école philosophique hostile à la démocratie et à l'égalité fondée par l'Américain Curtis Yarvin. Développée et diffusée notamment par le philosophe anglais Nick Land, elle constitue la référence théorique et idéologique de la droite alternative.

Dans son livre "Lumières sombres", publié en 2013, Land passe en revue ses idées, qui reposent sur l'incompatibilité de la démocratie avec la liberté. La démocratie aurait expiré, le processus électoral n'est plus crédible, l'intégration raciale est un mensonge, et la réalité occidentale prouve que les Blancs sont toujours supérieurs aux Noirs aux États-Unis et en Europe malgré les lois de l'égalité.

7) Alain de Benoist: théoricien de la différenciation ethnique

Journaliste et philosophe politique français, né en 1943. Membre fondateur du mouvement politique "Nouvelle Droite" et dirigeant du "GRECE", un groupe de réflexion ethnique nationaliste. Il est connu pour son opposition aux droits de l'homme et à la démocratie représentative. Ses écrits sont une source d'inspiration pour le mouvement alt-right aux États-Unis.

L'idée de "différenciation ethnique" repose sur le fait que chaque peuple et chaque culture ne peut s'épanouir que sur sa terre d'origine, que le brassage ethnique et culturel est un facteur de déclin et un projet raté qui n'aboutit qu'à la violence, la criminalité et l'éventualité d'une "guerre ethnique" en Europe entre Européens d'origine européenne et Européens d'origine arabe ou islamique.

Pointe de l'iceberg !

Il semble que les opérations terroristes de l'extrême droite ne sont que la pointe de l'iceberg, la véritable menace résidant au pied du mont enraciné dans l'esprit de certains intellectuels, spécialistes et gens ordinaires, convaincus de rejeter l'autre par tous les moyens illégaux.

Les allégations idéologiques seront toujours exploitées pour mener des attentats terroristes pouvant aboutir à l'utilisation d'armes nucléaires pour atteindre le noble objectif de cette tendance, qui est la suprématie de la race blanche, son exclusivité dans son périmètre géographique et l'élimination complète de l'autre ethniquement, religieusement ou culturellement.​