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24/04/2022
L’Agence Européenne des services répressifs (Europol) relevant de l’Union Européenne (EU) a publié son rapport annuel (Rapport sur la situation et les tendances du terrorisme 2021), qui a fait état des événements et des développements liés au terrorisme, suivi en détail la situation du terrorisme, les attaques terroristes et les arrestations dans l’UE en 2020, et présenté aux décideurs les caractéristiques du phénomène terroriste en Europe avec ses aspects quantitatifs et qualitatifs. 

Le rapport note que six États membres de l’UE ont signalé 57 attaques terroristes réussies, déjouées ou manquées en 2020, et que 21 personnes ont été tuées dans ces attaques, contre 10 personnes en 2019 dans 119 attaques. 449 arrestations pour suspicion d’infractions terroristes ont été signalées en 2020, tandis que le Royaume-Uni a signalé 185 arrestations liées au terrorisme. Ce nombre est bien inférieur à celui de 2019 (1004 arrestations, dont 281 au Royaume-Uni). On ne sait pas si cela indique une diminution de l’activité terroriste ou est le résultat de changements dans les capacités opérationnelles des autorités publiques pendant la pandémie du COVID-19.​

Terrorisme de Combat
Le rapport traite du terrorisme de combat, qu’il qualifie de « terrorisme djihadiste », ce qui signifie : terrorisme perpétré par des individus affiliés à Daech (État islamique) ou à d’autres groupes similaires, ou ceux qui adhèrent à ses idées et agissent selon ses directives. En 2020, trois États membres de l’UE, l’Autriche, la France et l’Allemagne, ont été témoins de dix attaques terroristes de ces groupes, ayant causé 12 morts et 47 blessés, et dont 4 en Belgique, France et Allemagne ont été déjouées. Au Royaume-Uni, 3 attentats terroristes ont été perpétrés et 2 ont été déjoués et la Suisse a subi 2 attentats. Cela signifie que le nombre d’attaques réussies en Europe (UE, Suisse et Royaume-Uni) en 2020 était plus du double de ce qu’il était en 2019. 

Le type d’attaque le plus courant en UE, Suisse et Royaume-Uni était des attaques commises dans des lieux publics contre des civils à l’aide d’armes à feu, coups de couteaux ou véhicules béliers. Tous les agresseurs étaient des hommes âgés de 18 à 33 ans.

Les familles des terroristes divergent d’orientations ou de lieu de naissance. 4 attaques réussies ont été commises par des citoyens de l’UE, 5 par des demandeurs d’asile ou immigrants illégaux, et toutes les attaques réussies étaient perpétrées par des loups solitaires. Il s’est avéré que certains suspects arrêtés en 2020 avaient eu des contacts via Internet avec des partisans de groupes terroristes en dehors de l’UE.

En outre, 254 personnes ont été arrêtées, dont 87 % étaient des hommes, pour suspicion de crimes, appartenance à un groupe terroriste, diffusion de propagande terroriste, préparation d’actes terroristes ou facilitation et financement du terrorisme. Ainsi, le nombre total d’arrestations pour suspicion de terrorisme dans les États membres de l’UE a diminué de plus de la moitié par rapport aux années précédentes.

Les États membres de l’UE restent préoccupés par le recrutement dans les prisons et la menace posée par les prisonniers libérés de Daech et d’Al-Qaïda. Dans cinq incidents terroristes (Autriche, Allemagne et Royaume-Uni) en 2020, des agresseurs libérés y ont participé, mais le taux de récidive parmi les condamnés pour terrorisme en Europe reste relativement faible.

Le recrutement de terroristes par Al-Qaïda et Daech avait recours aux réseaux en ligne, notamment les services de messagerie cryptés, ou via les relations hors ligne, telles que les amis ou les membres de famille. Comme les années précédentes, la propagande de Daech, Al-Qaïda et autres en dehors de l’UE a fourni du contenu extrémiste en ligne aux membres et aux sympathisants en Europe, y compris l’incitation à des attaques individuelles dans les pays occidentaux. Cependant, la propagande produite par les médias officiels de Daech a considérablement diminué en quantité et en type en 2020.



Dans sa propagande, l’organisation a souligné ses succès militaires en dehors de la Syrie et de l’Irak, dans une tentative de prouver sa mainmise continue sur des territoires. Elle a appelé ses combattants et ses partisans à libérer les prisonniers musulmans, y compris ceux d’Europe, et à des attaques e solo. Elle a cherché à rétablir ses réseaux sur Internet après avoir supprimé sa plate-forme sur l’application Telegram en novembre 2019. Al-Qaïda a continué à maintenir sa présence de propagande sur Internet en 2020 e à utiliser ses médias pour commenter l’actualité et confirmer publiquement sa relation avec ses affiliés régionaux.

Très peu de tentatives ont été faites pour se rendre dans les zones de conflit par des partisans de Daech, Al-Qaïda et autres en 2020, et de 20 à 50 % des éléments ayant séjourné en Irak et en Syrie depuis le début du conflit ont regagné l’Europe. Les restrictions de voyage dues à la propagation de l’épidémie de Coronavirus (Covid 19) ont affecté le retour des combattants terroristes étrangers en Europe. Cependant, un petit nombre de rapatriés ont été signalés dans les États membres de l’UE.

Le terrorisme d’extrême droite
Trois États membres de l’UE ont été affectés par quatre attaques terroristes perpétrées par l’extrême droite, dont une a tué neuf personnes en Allemagne et une a été déjouée. Trois des quatre auteurs (dont une femme) étaient des citoyens du pays dans lequel l’attaque a eu lieu ou devait avoir lieu.

34 personnes ont été arrêtées dans huit États membres de l’UE, soupçonnées d’implication dans des activités terroristes d’extrême droite, d’appartenance à un groupe terroriste, de planification ou de préparation d’un attentat ou de possession d’armes. La plupart des suspects étaient des hommes, âgés en moyenne de 38 ans, et ressortissants du pays dans lequel ils ont été arrêtés. 

De manière alarmante, nombre de suspects étaient mineurs au moment de leur arrestation, et la plupart étaient connectés, à divers niveaux d’implication, à des communautés en ligne qui promeuvent la violence et le concept de «résistance sans chef».

L’extrémisme de droite et le terrorisme ont continué à créer des groupes hétérogènes avec des idéologies et des objectifs politiques, allant des individus isolés associés à des communautés en ligne extrémistes aux organisations hiérarchiques. De nombreux pays de l’UE ont réussi à démanteler ou à interdire les groupes néonazis violents et les suprémacistes blancs qui préconisent d’attaquer les Juifs ou les musulmans, de détruire le système démocratique et de créer de nouvelles sociétés basées sur des croyances racistes. Certains de ces groupes finançaient leurs activités par des moyens criminels, notamment le trafic de drogue.

Parmi les facteurs qui augmentent la capacité des extrémistes de droite à commettre des violences figurent l’entraînement au combat, l’accès aux armes, et la formation paramilitaire pratiquée parfois en dehors de l’UE, notamment en Russie.

La sensibilisation du public aux crises climatiques et environnementales a incité les extrémistes de droite à promouvoir largement les opinions éco-fascistes qui attribuent ces crises à la surpopulation, l’immigration et l’échec des régimes démocratiques. Ces extrémistes utilisent souvent des jeux (vidéo) en 2020 pour diffuser leur propagande extrémiste et terroriste, en particulier parmi les jeunes, et diverses combinaisons de plateformes en ligne, de médias sociaux et de services de messagerie.

Terrorisme de gauche et anarchisme
Toutes les attaques et la plupart des complots attribués aux groupes de gauche et anarchistes ont eu lieu en Italie. La France a déjoué une telle attaque. Dans la plupart des cas, ces attaques ont endommagé des biens privés et publics (institutions financières et bâtiments publics).





Le nombre d’arrestations liées au terrorisme de gauche et anarchiste a diminué de plus de la moitié, par rapport à 2019, atteignant seulement 52 détenus, en raison de la baisse des arrestations en Italie (24 en 2020 contre 98 en 2019). Cependant, il est resté plus élevé qu’en 2018, ayant vu 34 interpellations, réparties entre l’Italie (24 détenus), Grèce (14), France (11), Espagne (2) et Portugal (1). 70% des personnes arrêtées étaient des hommes, âgés en moyenne de 40 ans pour les hommes et 34 ans pour les femmes. 

L’extrémisme de gauche et anarchiste a continué de menacer l’ordre public dans plusieurs États membres de l’UE et Internet a continué d’être le principal moyen pour les terroristes de gauche et anarchistes de revendiquer la responsabilité d’attentats, de diffuser de la propagande et de recruter.

Dissidents en Irlande et en Espagne
En 2020, la menace pesant sur l’Irlande du Nord de la part des groupes dissidents républicains demeurait « grave », comme précédemment identifiée par le Royaume-Uni, ce qui signifie qu’une attaque était très probable. Certains groupes militants anti-britanniques se sont activées à la suite de l’Accord du Vendredi Saint en 1998. La menace actuelle provient principalement de deux de ces groupes : la Nouvelle Armée Républicaine irlandaise (NIRA) et l’Armée Républicaine Irlandaise Continue (CIRA), dont les activités ont repris en dépit des restrictions gouvernementales de 2020. Elles usent d’armes à feu ou de petits engins explosifs, ainsi que d’engins explosifs improvisés et de missiles plus destructeurs.

Le soutien aux groupes dissidents républicains est presque limité à la fois à l’Irlande et à l’Irlande du Nord, en particulier le soutien au financement ou à l’accès aux armes. Actuellement, leurs actes terroristes reçoivent plus d’attention dans les médias internationaux à cause du problème de la frontière irlandaise, après le Brexit.

L’Espagne a connu une augmentation des activités séparatistes violentes en 2020, par rapport à l’année précédente, malgré les appels des groupes séparatistes à des initiatives alternatives et non violentes. Au total, neuf attentats terroristes ont été perpétrés par des militants séparatistes, dont la plupart en soutien aux prisonniers de l’ETA en grève de la faim.

L’organisation séparatiste (ETA) du Pays basque espagnol est restée inactive en 2020 et n’a commis aucun attentat terroriste depuis 2009. Malgré l’annonce de la dissolution et du désarmement de l’organisation en 2018, trois caches d’armes lui appartenant ont été découvertes en 2020, contenant des armes et des explosifs de toutes sortes. 12 personnes ont été arrêtées pour terrorisme séparatiste en Espagne, dont un membre de l’organisation accusée d’implication dans un assassinat politique en 2001, et trois autres membres inculpés d’appartenance à une organisation terroriste (ETA) et de détention d’explosifs à des fins terroristes.

Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)
Le PKK a continué à éviter les attaques sur le territoire de l’UE, mais il est resté actif dans la mobilisation non-violente pour soutenir financièrement et servir ses membres en Turquie et dans les pays voisins, à travers des associations kurdes légales.

Certains pays européens ont signalé que la pandémie du Coronavirus a limité les activités du PKK en matière de protestation et de collecte de fonds. Ces activités étaient souvent pacifiques, mais certaines étaient violentes à cause des affrontements avec les nationalistes turcs. L’Autriche et les Pays-Bas, par exemple, ont signalé que des troubles se sont produits entre les membres du PKK et les Loups Gris turcs pendant ou après les activités du PKK.

Certains membres du parti sont allés d’Europe en Syrie ou en Irak pour rejoindre les forces kurdes, la Belgique ayant signalé que neuf Belges d’origine kurde recrutés via les réseaux sont allés en Syrie et en Irak. Cinq sont revenus, un a été tué et un autre a été condamné au Royaume-Uni à un an de prison pour avoir participé aux camps d’entraînement du parti en Irak.

Terrorisme d’État
Outre les actes terroristes perpétrés par des extrémistes locaux ou des organisations terroristes étrangères, les États membres de l’UE ont également exprimé leur inquiétude au sujet des attaques terroristes perpétrées dans l’UE, au nom de gouvernements étrangers. De telles actions peuvent accroître les troubles entre les différentes communautés ethniques et nationales de l’UE. L’Allemagne a révélé que les services de renseignement étrangers espionnaient les dissidents en Allemagne, et les assassinats de ces dernières années ont montré que ces activités pouvaient conduire à des actes terroristes parrainés par l’État.

Des assassinats et des tentatives d’assassinat ont visé des citoyens russes d’origine tchétchène dans des États membres de l’UE ces dernières années. Fin janvier 2020, un dissident tchétchène a été assassiné dans un hôtel de Lille, en France. Le 4 juillet 2020, un citoyen d’origine tchétchène a été tué près de Vienne, en Autriche. En août 2019, le procureur fédéral allemand a inculpé un citoyen russe du meurtre d’un citoyen géorgien d’origine tchétchène à Berlin, affirmant que le crime avait été commis au nom d’agences gouvernementales de la Fédération Russe.

L’Iran a gardé en Europe des militants susceptibles d’être appelés à commettre des attentats terroristes. L’Autriche a arrêté un citoyen iranien en octobre 2020 soupçonné d’appartenir à la Force Al-Qods des Gardiens de la révolution iraniens. En Belgique, un diplomate iranien et trois Belges d’origine iranienne ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 20 ans de prison en février 2021 pour leur tentative d’attaquer un meeting de l’opposition iranienne près de Paris. En avril 2020, l’Allemagne a interdit les activités du Hezbollah, l’organisation terroriste libanaise soutenue par l’Iran, et en juin de la même année, un Libanais a été arrêté en Autriche, soupçonné d’appartenir au parti.

Coronavirus et terrorisme
Il est encore difficile d’évaluer l’impact de la pandémie de Coronavirus sur la situation du terrorisme en 2020, et si la baisse des arrestations liées au terrorisme dans l’UE cette année-là était liée aux effets de la pandémie. Toutefois, l’une des attaques de l’extrême droite en Belgique est due à son opposition à la politique officielle sur le coronavirus. Le gouvernement tchèque a arrêté également un citoyen accusé d’avoir menacé de lancer une attaque terroriste si les restaurants et les bars n’ouvraient pas.

En raison des restrictions imposées à la vie publique, dont la fermeture ou l’accès limité aux musées, églises et stades, et la baisse des vols internationaux pour lutter contre la pandémie, les chances de commettre des attentats terroristes faisant un grand nombre de victimes ont diminué.

Le confinement a limité les opportunités de rencontres directes entre extrémistes et terroristes et accru les communications et le temps que les gens passent à utiliser Internet et donc leur exposition à la propagande terroriste. L’épidémie a aussi intensifié les activités transfrontalières en ligne de la droite, face aux restrictions des contacts personnels entre ses membres.

Des terroristes et des extrémistes d’orientations idéologiques différentes ont tenté de présenter l’épidémie de Coronavirus conformément à leurs visions. L’EI a décrit l’épidémie comme un châtiment divin ayant frappé ses ennemis et incité ses partisans à lancer des attaques pour profiter de la faiblesse de pays anti-coalition. Al-Qaïda a indiqué que la propagation de l’épidémie dans les pays à majorité musulmane était un signe de leur abandon du véritable islam ! Elle a appelé les musulmans à rechercher la miséricorde de Dieu en libérant les prisonniers musulmans, en subvenant aux besoins des nécessiteux et en soutenant les groupes combattants (jihadistes). Les extrémistes de droite ont utilisé la pandémie pour renforcer leur rhétorique sur les théories du complot teintées d’antisémitisme, anti-immigration et anti-islam. Les extrémistes de gauche et les anarchistes ont inséré les critiques des mesures anti-épidémiques des gouvernements dans leur rhétorique extrémiste.

Les États membres de l’UE se sont montrés préoccupés du fait que la pandémie puisse constituer un facteur de stress supplémentaire pour les extrémistes ayant des problèmes de santé mentale, les loups solitaires pouvant recourir à la violence plus tôt qu’ils ne le feraient dans d’autres circonstances. Parmi les effets de l’épidémie pouvant contribuer à l’auto-extrémisme figurent : l’isolement social de la famille et des amis imposé par les restrictions à la liberté de circulation des personnes, la diminution de la sécurité de l’emploi, les difficultés financières en résultant, le mécontentement vis-à-vis des mesures anti-épidémiques et la prolifération de la quantité de désinformation en ligne.

De manière générale, l’épidémie et les crises économiques et sociales qui en résultent ont contribué à élever le degré de polarisation des sociétés, ce qui a provoqué un durcissement des mentalités et une augmentation du mécontentement social. Ce climat a créé des opportunités pour les groupes extrémistes d’atteindre des publics en dehors des cercles traditionnels qui les soutiennent.

Armes des attaques terroristes
La plupart des opérations terroristes 2020 ont été menées par des moyens disponibles, tels que les coups de couteau, les voitures-béliers et les incendies criminels. Les armes à feu ont été utilisées lors de l’attaque terroriste de droite à Hanau, en Allemagne, le 19 février, et l’attaque terroriste à Vienne le 2 novembre.

Comme les années précédentes, des explosifs artisanaux ont été utilisés dans la plupart des attentats terroristes soupçonnés d’être liés à Daech, Al-Qaïda et autres en 2020, le trioxyde d’acétone (TATP) n’étant plus le type d’explosif dominant. Le modus operandi préféré en 2020 était l’utilisation de mélanges faiblement explosifs à la lumière des réglementations de l’UE restreignant le transfert ou l’achat de type 1 (TATP). Cependant, il a été noté que des tentatives ont été faites pour obtenir ces explosifs de certains États membres de l’UE auprès de magasins d’électronique.

Les matières explosives utilisées par Daech, Al-Qaïda et homologues en 2020 étaient soit fabriquées localement, soit mélangées (comme le nitrate de potassium, la poudre d’aluminium, le soufre), ou extraites de biens commerciaux facilement disponibles (comme les feux d’artifice, cartouches). Aussi, la plupart des engins explosifs improvisés ont-ils été conçus sous la forme d’un tube primitif, ou de bombes d’autocuiseurs.

Le niveau d’utilisation d’explosifs par le terrorisme de droite dans ses attaques n’a pas augmenté par rapport à 2019, ses méthodes optant toujours pour les incendies criminels et les attentats à l’explosif usant d’engins incendiaires improvisés ou d’engins explosifs fabriqués de matériaux disponibles. Certains incidents ont montré que les terroristes de droite sont toujours intéressés et capables de fabriquer des explosifs plus complexes, tels que le trioxyde d’acétone et la nitroglycérine.

Les groupes d’extrême gauche ont utilisé, comme les années précédentes, des engins explosifs à base de liquide ou de gaz inflammables, ou des engins explosifs bourrés d’explosifs disponibles, comme le mix de feux d’artifice. De nombreuses campagnes de colis piégés ont été lancées en 2020, dont la plupart étaient des engins explosifs primitifs, alimentés par des accumulateurs (piles) cachés dans des colis postaux ou des enveloppes, et équipés de produits incendiaires ou faiblement explosifs.

L’année 2020, comme la précédente, n’a connu aucune attaque terroriste utilisant des matières chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires en UE. Cependant, des procès de cas impliquant l’utilisation de ces matières ont été intentés en 2020, ou étaient en cours au moment de la rédaction de ce rapport. Ainsi, les auteurs du complot allemand de ricin en 2018 ont été condamnés respectivement à 10 et 8 ans de prison. Dans d’autres cas, des suspects ont été arrêtés après avoir manifesté leur intention d’acheter des matières chimiques, biologiques ou nucléaires via le Dark Web.

Terrorisme et crime
Il existe peu de preuves de coopération systématique entre criminels et terroristes en UE, bien que les deux parties utilisent des moyens illégaux pour atteindre leurs cibles. Des chevauchements entre les groupes criminels organisés et les extrémistes de droite ont été constatés, notamment pour l’achat d’armes et le trafic de drogue. En janvier 2020, l’Espagne a arrêté 16 membres espagnols d’une organisation internationale de trafic de drogue et d’exploitation sexuelle des femmes. L’organisation finançait les activités de groupes violents d’extrême droite, notamment des émeutiers du football et groupes néonazis. Fin 2020, une organisation de commerce et de vente d’armes à des réseaux de trafic de drogue dans le sud de l’Espagne a été démantelée. Parmi les personnes arrêtées figurait un citoyen allemand lié à des réseaux d’extrême droite et néonazis.

En Irlande et en Irlande du Nord, la relation entre les groupes dissidents républicains et les groupes criminels organisés et non organisés semble bien établie. Les groupes irlandais de racket, trafic d’armes et contrebande de cigarettes, alcool et carburant ont renforcé leurs liens avec le crime organisé.

Les criminels désireux de gains sont souvent réticents à coopérer avec les terroristes pour éviter d’attirer l’attention des autorités sur leurs activités. En revanche, les individus appartenant à des réseaux terroristes avaient des liens personnels avec le crime organisé. Les activités de Daech et d’Al-Qaida et homologues sont apparemment partiellement financées par d’autres crimes, dont le vol, l’extorsion, le trafic de drogue, le blanchiment d’argent et la traite d’êtres humains, tendance clairement observée parmi les membres des communautés tchétchène et afghane et des Balkans occidentaux. 

Financement du terrorisme
Les sources de financement du terrorisme varient considérablement. Les terroristes dépendent de fonds licites et illicites. Le financement d’organisations terroristes est différent du financement d’attaques perpétrées par des terroristes solitaires ou de petits groupes. Les attaques solitaires ou de petits groupes aux tactiques faciles ne nécessitent pas d’importantes dépenses et peuvent donc être autofinancées par leurs auteurs. Le besoin de financement devient plus important si les terroristes envisagent d’utiliser des armes à feu, des explosifs ou d’autres moyens plus sophistiqués.

Les organisations extrémistes et terroristes ont besoin de soutien financier pour subvenir à leurs besoins, tels que l’entretien d’infrastructures, le recrutement, la propagande et le renforcement des capacités opérationnelles. Certaines organisations comptent sur leurs membres pour financer leurs activités. Les organisations d’extrême droite violentes en Finlande et en Suède financent leurs principales activités avec les cotisations de leurs membres et les dons de leurs membres et sympathisants. La Pologne a noté que les groupes d’extrême droite financent leurs activités via des entreprises privées et légales exploitées par leurs membres, en plus de leurs contributions. Les activités criminelles des extrémistes violents de gauche sont généralement peu coûteuses et les principales ressources financières des réseaux proviennent des soi-disant partis de soutien.

Des fonds sont également collectés en Europe pour financer les activités de groupes terroristes à l’étranger par le biais de sources légales, telles que des collectes de fonds et de dons. D’autres sont illégaux, comme le trafic de drogue. L’Irlande a signalé 17 arrestations en 2020 liées au financement du terrorisme par l’EI, Al-Qaïda ou autres.

Des collectes de fonds pour soutenir les femmes et les enfants détenus dans des camps pour les anciens membres de Daech et leurs familles au nord-est de la Syrie ont été détectées. La Suisse a engagé des poursuites pénales liées au financement du terrorisme, impliquant des membres de famille en voyage qui ont envoyé un soutien financier à leurs proches dans des zones de conflit. La Suède a indiqué que l’argent transféré vers la zone de conflit en 2020 était principalement destiné à soutenir les personnes détenues dans des camps ou des prisons. Ce type de financement serait légal en Suède, mais certains craignent qu’il ne contribue indirectement à aider les Suédois parmi les anciens combattants à retourner en Suède ou dans un pays tiers. L’Espagne a noté que les combattants terroristes étrangers dans les zones de conflit ont reçu de l’argent pour retourner en Europe et a arrêté sept personnes accusées d’avoir aidé des combattants terroristes liés à l’EI dans les zones de conflit.

Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a continué à obtenir des dons par des moyens légaux et illégaux en Europe, dont la collecte de fonds, l’extorsion et d’autres activités du crime organisé. L’Allemagne a arrêté des membres du PKK pour leur participation à la coordination des campagnes annuelles de financement. L’argent est transféré d’Europe vers des terroristes hors d’Europe au moyen de sociétés de transport, de virements bancaires, du système bancaire informel connu sous le nom de hawala et de sociétés de transfert d’argent telles que MoneyGram et Western Union.

Le nombre de cas d’abus de nouveaux moyens de paiement, notamment de crypto-monnaies, est resté faible en 2020. Cependant, la possibilité d’utiliser la crypto-monnaie pour financer le terrorisme a été confirmée en août 2020, lorsque le ministère américain de la Justice a annoncé la confiscation de plus de 300 comptes de crypto-monnaie utilisés dans le financement du terrorisme.

Procès et condamnations
Les pays de l’UE et la Grande-Bretagne ont achevé des procès qui se sont soldés par 422 verdicts de condamnation ou d’acquittement, la France, l’Allemagne et la Belgique ayant enregistré le plus grand nombre de poursuites pour crimes terroristes en 2020 (respectivement 155, 67 et 52).

Certaines condamnations ou acquittements en 2020, signalés en UE sont définitifs, et d’autres attendent la décision judiciaire finale relatives aux recours déposés par le procureur ou l’avocat de la défense. La peine de prison moyenne pour les crimes terroristes prononcée par les tribunaux des États membres de l’UE était de huit ans, ce qui était plus élevé qu’elle ne l’était en 2019. La peine la plus courte était de trois mois et la plus longue était la réclusion à perpétuité.

La plupart des condamnations et acquittements (314) étaient liés au terrorisme de l’EI, d’Al-Qaïda ou d’autres organisations terroristes, en grande partie pour des crimes liés au conflit en Syrie et aux activités de l’EI. La France a enregistré le plus grand nombre de condamnations et acquittements (143), suivie de la Belgique (51) et de l’Allemagne (35).

Les condamnations et les acquittements pour crimes terroristes de la gauche et des anarchistes étaient les deuxièmes plus importants de l’UE. Comme les années précédentes, le plus grand nombre de condamnations et d’acquittements pour des infractions de terrorisme séparatiste ont été prononcés en Espagne. Les tribunaux de la République tchèque, France, Allemagne et Pays-Bas ont examiné des affaires de crimes liés à des organisations terroristes séparatistes.

Le nombre de condamnations pour crimes de terrorisme de droite en 2020 est passé à 11, contre six en 2019. La participation aux activités d’un groupe terroriste, le financement du terrorisme ou la formation à des fins terroristes figuraient parmi les crimes terroristes les plus courants examinés par les tribunaux en 2020, suivis des crimes de diffusion de propagande terroriste, d’incitation au terrorisme, de recrutement et de complicité dans la préparation et facilitation des crimes terroristes. Certaines personnes comparues devant le tribunal pour des accusations de terrorisme en 2020 avaient déjà été condamnées pour des infractions terroristes ou autres dans le même État membre de l’UE ou ailleurs.



Voyager à des fins terroristes
On estime que 5000 combattants terroristes étrangers européens se sont rendus dans la zone de conflit en Syrie et en Irak. Il semble que le nombre total de combattants terroristes étrangers dans l’UE en 2020 demeurait stable non seulement en raison des restrictions provoquées par Covid-19, mais aussi en raison de la réduction des infrastructures soutenant les groupes terroristes en Syrie et en Irak.

Au moment de la préparation de ce rapport, il était impossible de déterminer le nombre total final de combattants terroristes étrangers en UE et de vérifier leur statut ou leur localisation. Cependant certains États ont pu fournir quelques chiffres (nombre total, rapatriés, détenus et morts). La France qui compte le plus grand nombre de ces combattants, a recensé 1451 ressortissants français ou étrangers, âgés de 13 ans et plus, partis depuis la France depuis 2012. Fin 2020, 254 citoyens ou résidents français étaient détenus en Syrie et en Irak (84 hommes, 137 femmes et 33 mineurs).

L’Allemagne a identifié 1070 Allemands qui se sont rendus en Irak ou en Syrie, dont près de la moitié a rejoint Daech, les affiliés d’Al-Qaïda ou d’autres groupes, combattu avec eux ou les a soutenus. Plus de la moitié de ceux qui ont voyagé avaient la nationalité allemande, un quart était des femmes, un tiers est revenu et 260 d’entre eux sont morts en Irak ou en Syrie.

Aucun des combattants terroristes étrangers ne s’est rendu dans les zones de conflit depuis l’Italie en 2020, et un seul en est revenu. Depuis 2011, 146 individus (132 hommes et 14 femmes), ayant des liens avec l’Italie, ont rejoint les groupes armés en Syrie et en Irak, dont 53 sont morts. Le sort de 61 d’entre eux est resté inconnu et 32 d’entre eux sont retournés en Europe (10 sont actuellement en Italie). Les Pays-Bas ont indiqué que le nombre de ces terroristes n’a pas changé en 2020, environ 305 personnes s’étant rendu en Syrie et en Irak, dont 100 ont été tuées et 60 sont revenus aux Pays-Bas.

La Belgique a précisé que 288 combattants terroristes étrangers belges se trouvaient dans la zone de conflit syrienne ou irakienne depuis la chute de Baghouz en 2019. Certains d’entre eux, principalement des hommes, seraient décédés fin 2020, et 134 seraient encore en vie. L’Autriche a recensé 334 personnes (257 hommes et 77 femmes) qui devaient se rendre, se sont rendus ou revenus de zones de conflit, dont 104 y sont toujours et 95 sont revenus en Autriche.

La Suède estime qu’environ 100 adultes et un groupe d’enfants sont encore dans les zones de conflit ou aux environs, et que certains ont été détenus. La Suède n’avait aucune information en 2020 selon laquelle quelqu’un s’était rendu dans une zone de conflit, mais un petit nombre a rebroussé chemin. Le Danemark a estimé que pas moins de 159 personnes sont allés en Syrie ou en Irak depuis l’été 2012, et jusqu’à la préparation de ce rapport, près de la moitié sont retournées au Danemark ou dans d’autres pays européens, alors qu’un tiers d’entre eux ont été tués dans la zone de conflit.
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N°36
Une publication mensuelle qui présente des lectures de rapports internationaux sur le terrorisme
25/04/2022 04:23